Chers patients,

La décision de faire grève ce 7 juillet 2025 n'a pas été facile à prendre.

Depuis des mois, nous essayons de nous faire entendre. Le ministre Vandenbroucke fait mine de consulter, mais poursuit en réalité une politique unilatérale. Depuis longtemps, il est question de réviser la nomenclature et d'adapter les modes de rétribution des médecins. Nous ne sommes pas opposés au changement, mais cela doit se faire en concertation. Or, aujourd'hui, les règles du jeu sont modifiées sans coordination, sans compréhension du terrain, et en reportant sans cesse les dossiers cruciaux. C'est inacceptable.

Cette grève n’est pas un abandon de notre mission, mais un appel à une réforme réfléchie, juste, et respectueuse du métier.

La médecine doit rester accessible à tous. C'est une idée noble que nous portons chaque jour. Le serment d'Hippocrate n'est pas une vaine formule. Mais la médecine a un coût. Et ce coût augmente, non pas à cause des médecins, mais à cause des technologies, des examens, des dispositifs, et des médicaments dont les prix explosent.

Nous soutenons pleinement l'idée d'une solidarité renforcée avec les patients les plus fragilisés. Il est concevable de limiter les suppléments dans certains cas. Mais quand il s'agit d'actes nécessaires non couverts par l'INAMI, est-ce vraiment au médecin d'en assumer le coût ?

Peut-on exiger des médecins qu’ils assurent des soins non remboursés sans compensation, même pour les patients qui en ont les moyens ? Cela revient à faire reposer la solidarité sur un seul maillon du système : le médecin.
C'est un choix de société : si l'on veut que chacun accède à une médecine de qualité, alors c'est à l'ensemble de la société de contribuer à cet effort.

Oui, il existe des disparités, des dérives parfois. Elles doivent être corrigées. Mais vouloir faire des économies sur le dos des médecins, sans reconnaissance de leur travail, est une erreur grave. Cela les démotive, les pousse à quitter la profession, et détourne les jeunes générations.

Les suppléments : les fantasmes du Ministre

Avant de juger les suppléments, il faut comprendre ce qu’ils recouvrent réellement.

Le Ministre laisse entendre que les suppléments seraient superflus ou injustifiés. La réalité est tout autre.

Les suppléments couvrent souvent bien plus que des "à-côtés" :

  • Ils permettent de compenser des actes nécessaires mais non remboursés par l’INAMI,

  • Ils tiennent compte du temps réellement consacré à chaque patient,

  • Ils contribuent aussi à l’équilibre économique de cabinets médicaux équipés de matériel coûteux et en constante évolution,

  • Ils permettent aux médecins de financer des formations longues, onéreuses et continues, nécessaires pour rester à jour dans un domaine médical en perpétuelle évolution.

Être médecin, c’est avoir fait des études longues et exigeantes : au minimum 10 à 12 ans, avec des formations continues, congrès, certifications indispensables, non remboursés, mais essentiels à la qualité des soins. Cette carrière commence tard, réduisant la durée totale de l'activité professionnelle. Notre profession est aussi une profession de responsabilité : humaine, médicale, juridique.

Faire croire que les suppléments seraient un caprice, c’est nier cette réalité. C’est dévaloriser l’engagement, l’expertise, et mettre en danger la qualité des soins.

Ce que vous payez concrètement

💳 Consultation chez un dermatologue conventionné :

  • Montant INAMI : 41,90 €

  • Ticket modérateur (patient) : 12 € (ou 3 € voire moins pour les patients BIM – bénéficiaires de l’intervention majorée)

  • Le reste est pris en charge par la mutuelle

💸 Et chez un dermatologue non conventionné ?

Des suppléments peuvent s’ajouter.

Outre le prix de la consultation, il y a celui des actes techniques, qui peuvent également comporter un ticket modérateurà charge du patient. Ces actes sont actuellement directement facturés à la mutuelle, mais des suppléments peuvent être demandés lorsque l’INAMI ne prévoit qu’un remboursement limité.

Des exemples concrets :

  • Une consultation longue (20 minutes ou plus) permet d’aborder plusieurs problèmes, d'aller au fond des choses. Elle est plus utile, mais n’est pas valorisée à sa juste mesure.

  • Certains actes nécessitent du matériel spécialisé très coûteux, insuffisamment couverts par l’INAMI.

  • Des actes utiles ne sont remboursés que dans des conditions très restrictives. Exemple : la dermoscopie digitalisée (utile dans le suivi des naevi) n'est remboursée qu'une fois par an, uniquement si le patient a déjà eu un mélanome ou présente un nombre élevé de naevi atypiques.

Depuis janvier 2025, les suppléments sont interdits pour les patients BIM Avantage. Cela a déjà des conséquences graves :

Pour les tests allergiques épicutanés, l'INAMI ne rembourse qu'une quarantaine de tests, alors qu'un bon diagnostic en requiert souvent entre 70 et 120. Je suis tiraillée entre le choix de faire un examen incomplet et celui d'offrir les tests complémentaires à mes frais.

Dès 2026, tous les patients BIM seront concernés par cette restriction.

Cette confusion, alimentée par des discours politiques simplificateurs, nuit à la transparence et à la confiance.

Nous continuerons à défendre une médecine de qualité, humaine, accessible, mais aussi respectée.

Merci pour votre soutien, votre compréhension et votre confiance.

Avec dévouement,
Votre médecin.


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